À Riantec, il y avait autrefois une veuve qui avait un fils. Tous deux vivaient pauvrement, et ils étaient obligés de tirer la charrue à tour de rôle parce qu'ils n'avaient pas assez d'argent pour acheter une paire de boeufs.
Un matin, elle dit à son fils : - Allons à la foire d'Hennebont pour y chercher une paire de boeufs. - Mais, ma mère, répondit le fils, nous n'avons pas le moindre argent ! - Cela ne fait rien, dit-elle, je sais que j'en trouverai. Ils partirent donc pour la foire d'Hennebont.
Ils marchaient d'un pas rapide et, à la croisée de trois chemins, ils virent un petit homme sortir de dessous la terre et venir vers eux. - Où allez-vous comme cela ? demanda le petit homme. - À la foire, à Hennebont, répondit le fils, pour acheter une paire de boeufs. Mais nous n'avons pas d'argent pour payer. - Si vous descendez avec moi dans ce trou, dit le petit homme, et si vous savez vous comporter comme il faut, je vous garantis que vous ne manquerez de rien.
Ils descendirent et furent bien étonnés de ce qu'ils voyaient : il y avait là une grande maison, avec de beaux meubles et de la vaisselle abondante, et de bons lits avec des couvertures. C’était une maison de korrigans Par la fenêtre, on voyait une prairie bien verte, avec des vaches et des boeufs qui paissaient. - Tout cela est à vous, dit le père des korrigans. Mais je dois vous avertir que notre oncle pourrait venir içi. Il est vieux et très méchant. Si vous nous en débarrassez, vous nous rendrez un fier service.
La nuit, la mère et le fils entendirent un grand bruit et commencèrent à trembler. Ils virent le vieux korrigan qui tempêtait et jurait. - Ah ! criait-il, je vous vois et vous êtes à moi ! Il les poursuivait l'un et l'autre. La mère se plaça au pied du lit tandis que le fils se cachait dessous. Il tira sept coups de revolver, mais la veuve s'était jetée par terre et elle ne fut pas atteinte.
Alors, le vieux korrigan brandit son couteau, qui était presque aussi grand que lui-même, et se précipita vers la pauvre femme. Mais, à ce moment, le fils sortit de dessous le lit et lui coupa la tête.
Alors, à ce même moment, arrivèrent des korrigans en grand nombre, ils étaient sûrement plus d'une centaine. Ils riaient et dansaient de joie en répétant : - Il est mort, le barbare, le cruel qui nous tyrannisait ! Nous danserons et nous planterons un arbre en signe de notre liberté. Quant à la veuve et son fils, ils vécurent tranquillement dans la maison que leur avaient donnée les korrigans, et ils ne manquèrent jamais de rien.