L’ogre de barbarie était très grand et très fort. Il était habillé d’une épaisse armure et ne se déplaçait jamais sans son lourd gourdin aux pics aiguisés. Il vivait seul dans les bois sombres et noirs. Depuis quand hantait-il les lieux ? Nul ne le sait. Il harcelait les villageois, abîmait leurs champs, croquait quelques enfants de temps en temps.
Il lui était impossible de manger la petite fille maintenant. Et il avait peur de la rendre au Roi. Que lui arriverait-il ? Prenant son courage à deux mains, il décida de se rendre malgré tout au Royaume d’Agapé. « Si le Roi m’accorde sa faveur et me pardonne, je m’engage à le servir… Mais si je dois mourir à cause du mal que j’ai causé, et bien, je mourrai… » se dit l’ogre.
L’ogre s’approchait lentement des grilles du château, tenant par la main la princesse qui sautillait à ses côtés. Le coeur qu’il venait tout juste d’avoir lui semblait bien lourd à présent. « L’ogre est là, l’ogre est là ! » crièrent les habitants du château, effrayés. « N’ayez pas peur ! leur répondit-il, je ne viens pas pour vous faire du mal, je vous ramène la princesse ».
Les habitants furent tout émus et le Roi pardonna à l’ogre. Il le chargea de protéger son Royaume et la princesse. L’ogre lui en fut pour toujours reconnaissant, et son coeur, depuis ce jour, ne cessa jamais de battre et d’aimer. Désormais, gentes dames et damoiseaux, n’ayez pas peur de l’ogre, mais embrassez-le plutôt… qui sait si vous n’entendrez pas son coeur battre comme le votre !